Ils ont repris du service. Ces Togolais qui ont le monopole de la lutte et qui peuvent décerner la prime de meilleur opposant ou de faux opposant à qui ils veulent, ont repris du service.
Après Kokou Koffigoh, Edem Kodjo, Zarifou Ayéva, Messan Gnininvi, Gilchrist Olympio, Agbéyomé Kodjo, Yawovi Agboyibor… ils ont finalement jeté leur dévolu sur le professeur Aimé Gogué. En 20 ans, notre combat pour une société juste et démocratique s’est transformé en règlement de compte entre des camarades de lutte. Et on ne s’est jamais posé la question pourquoi cela est ainsi. Au lieu de s’interroger sur les causes des échecs répétitifs, l’opposition trouve toujours le bouc-émissaire dans son propre camp et appelle le peuple inculte à le lyncher.
Aujourd’hui, c’est le professeur Aimé Gogué qui est la cible trouvée parce qu’il a une opinion différente de certains de ces camarades de lutte. Ce professeur depuis plus de 20 ans de lutte et après avoir été membre du tout premier gouvernement de transition, a été le plus constant dans la lutte démocratique du Togo, personne ne peut lui contester cela. Mais subitement, il est devenu aujourd’hui, la cible à abattre parce qu’il aurait refusé de s’aligner sur une position qu’il n’épouse. Du coup, il est accablé de tous les maux. Le pouvoir lui aurait fait des propositions pour le nommer à la Primature après la présidentielle, patati patata. Trop ridicule ! Ce professeur, à son âge, ne sait pas ce qui est bien pour lui pour se faire son propre opinion que de se laisser manipuler ainsi ? Il faut cesser de faire offense à l’intelligentsia togolaise.
En politique, on peut ne pas avoir les mêmes convictions mais il faut respecter son adversaire politique ou partenaire lorsque ce dernier exprime une position qui n’est pas la nôtre. Mais au Togo, l’opposition togolaise en a cure. On préfère attaquer son camarade de lutte avec une telle virulence qu’on ne le fait pas à son adversaire d’en face.
Par ce comportement de manipulation de l’opinion, l’opposition togolaise a poussé sans le vouloir ses leaders dans les bras du pouvoir en place. Elle se présente aujourd’hui comme une armée qui, à l’approche d’une grande bataille, ses principaux généraux se retrouvent dans le camp adverse. Dans ces conditions comment peut-elle gagner la bataille ?
En 24 ans de lutte, les leaders de l’opposition qui ont rallié le pouvoir, poussé ou non par la manipulation de l’opinion par leurs camarades de lutte, sont plus nombreux que ceux qui ont fait le sens contraire. Or, il est plus certain que l’opposition ne peut gagner une élection à l’heure actuelle en étant divisée. Ceux qui croient toujours qu’un candidat de l’opposition sans le soutien des autres courants de cette opposition peut gagner une élection au Togo, font fausse route. Le paysage politique au Togo a évolué ces dernières années.
Si l’UFC a toujours gagné les présidentielles face au pouvoir, c’est grâce à l’aura de Gilchrist Olympio. Celui-ci depuis 2010 a perdu son mythe comme nous l’ont prouvé les législatives de juillet 2013. Et aucun leader de la scène politique togolaise n’a cet aura pour prétendre gagner une élection dans ce pays sans le concours des autres courants de l’opposition. C’est là où l’union demeure une nécessité catégorique. Vouloir aller en solo, c’est faire de la figuration.