Le ministère du Développement à la Base, de l’Artisanat, de la Jeunesse et de l’Emploi des jeunes en collaboration avec le Centre de développement de l’OCDE a organisé le mercredi 14 mars, un atelier de lancement du rapport « Examen du bien-être et des politiques de la jeunesse au Togo » dans le cadre du projet « Inclusion des jeunes » cofinancé par l’OCDE et la Commission de l’Union Européenne (UE).
Cet atelier a pour objectif général de présenter aux acteurs nationaux, les principaux résultats et recommandations du rapport de l’OCDE. Il entend également amener les participants à identifier les actions prioritaires nécessaires pour la mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport. Cette rencontre vise aussi à inciter les acteurs à encourager et favoriser la participation active des jeunes à la vie publique et leur engagement citoyen pour l’édification de la paix au sein de la société.
Les domaines ciblés par l’examen et les résultats obtenus
L’examen du bien–être et des politiques de la jeunesse au Togo dresse un état des lieux exhaustif de la situation des jeunes en matière d’inclusion sociale et de bien-être, sur la base des dernières données disponibles et suivant une approche multidimensionnelle. De nombreux aspects sont explorés dans les domaines de la santé, l’éducation et les compétences, l’emploi, l’engagement civique et politique, le capital social et le bien-être subjectif. L’examen se focalise surtout sur les perceptions des jeunes quant à leur capital social et leur engagement civique et politique, à l’aide d’une enquête qualitative réalisée à l’échelle nationale, ainsi que sur la situation de jeunes particulièrement vulnérables que sont les enfants de la rue et les consommateurs de drogues, à partir d’études de cas menés dans la commune de Lomé et ses environs. Sur la base des résultats de l’analyse, des recommandations concrètes en matière de politiques publiques sont proposées afin de maximiser l’action gouvernementale en faveur de la promotion de la jeunesse.
L’examen montre que la jeunesse reste confrontée à de nombreux défis. La mortalité des jeunes, notamment celles des hommes, est relativement élevée au Togo. Le nombre de grossesses précoces reste important, et la consommation de substances nocives préoccupantes chez les jeunes.
En raison des difficultés d’accès, de rétention et de progression dans le système éducatif, la plupart des jeunes atteigne un faible niveau d’études. En outre, les compétences très faibles des élèves du primaire, principalement en milieu rural et dans les écoles publiques, témoignent du déficit de qualité du système éducatif. De nombreux jeunes ne sont ni dans l’emploi, ni scolarisés ou en formation, et ceux qui travaillent sont en grande majorité concentrés dans les emplois de faibles qualité. Enfin, l’engagement civique et le capital social des jeunes soulèvent des inquiétudes majeures. Compte tenu de tout ce qui précède, il n’est pas surprenant de constater que les jeunes sont très peu satisfaits de leur vie de manière générale et nombreux à éprouver des émotions négatives.
D’après les résultats de l’enquête qualitative, les jeunes togolais ne jouissent pas en effet d’un capital social élevé et leur participation civique ou politique est assez marginale. Les réseaux de soutien social des jeunes se limitent essentiellement au cercle familial, en premier lieu la parenté immédiate. Les jeunes ont une connaissance relativement faible et une vision plutôt négative des associations et groupes de soutien qui existent dans leur milieu. En conséquence, beaucoup n’y adhérent pas ou n’y participent pas activement. Les jeunes également font preuve d’une désaffection poussée à l’égard des institutions publiques qui limitent par ailleurs leur engagement civique. De même, les jeunes sont méfiants à l’égard des responsables politiques, ce qui tend à les éloigner de la sphère politique. La gérontocratie et l’instrumentalisation affaiblissent aussi l’engagement politique des jeunes qui n’échappe pas non plus à certains déterminismes sociaux et culturels tels que l’environnement familial et communautaire, et le statut social.
Le cas des enfants de la rue et des consommateurs de drogues
Les études de cas menées auprès des enfants de la rue et des jeunes consommateurs de drogues ont abouti à des résultats édifiants. Le départ des enfants pour la rue résulte de la dislocation et de l’extrême pauvreté du foyer familial, ainsi que de la maltraitance et des conditions de vie difficiles qui en découlent. Une fois dans la rue, les enfants sont confrontés à de nombreuses difficultés, en premier lieu la faim, le manque de logement et l’insécurité, et sont contraints de travailler pour survivre. Concernant les jeunes consommateurs de drogues, un contexte familial dégradé, le chômage et l’influence des pairs apparaissent comme des éléments déterminants de l’initiation à ces substances nocives. Après s’être initiés, les jeunes sont nombreux à poursuivre la consommation de drogues en raison des multiples fonctions qu’elle remplit, notamment le gain de la productivité associée à l’augmentation des facultés physiques et intellectuelles. La vie dans la rue et l’usage de drogues portent sérieusement atteinte au bien-être des jeunes, et ce dans de multiples domaines tels que la santé, la sécurité, l’éducation et l’emploi.
Beaucoup reste à faire malgré les efforts du gouvernement
Selon le rapport, l’inclusion sociale et le bien-être des jeunes sont au cœur des préoccupations du gouvernement. En témoigne, d’une part, la création en 2010 d’un ministère dédié à la promotion de la jeunesse et à l’emploi des jeunes (le ministère du Développement à la base, de l’Artisanat, de la Jeunesse et de l’Emploi des Jeunes) et, d’autre part, l’adoption récente de deux politiques majeures que sont la Politique nationale de la jeunesse (PNJ) et le Plan stratégique national pour l’emploi des jeunes (PSNEJ). Cependant, les actions menées couvrent largement le domaine de l’emploi au détriment d’autres secteurs qui concourent à l’épanouissement de la jeunesse, principalement les activités culturelles, socio-éducatives et la formation civique. Les résultats des programmes mis en place sont encourageants mais restent bien insuffisants face à l’ampleur des défis. L’efficacité de l’action gouvernementale en faveur des jeunes, pilotée par le MDBAEJ, est entravée par le manque de coordination des acteurs et de synergie des interventions.
Le MDBAEJ, bénéficie de nombreux atouts pour mener à bien la politique de la jeunesse mais ne dispose pas de moyens financiers et humains suffisants.
Les recommandations du rapport
D’après le rapport, pour améliorer l’efficacité de l’action gouvernementale en faveur des jeunes et répondre au mieux à leurs besoins, le Togo devra en particulier poursuivre et intensifier les activités culturelles, socio-éducatives et civiques sur l’ensemble du territoire, mettre en place un cadre institutionnel de coordination des interventions, doter les programmes de mécanismes de suivi et d’évaluation d’impact, accroître les ressources financières et humaines du MDBAEJ et renforcer les capacités de son personnel tout en créant un système d’information centralisé sur le secteur jeunesse pour guider les politiques publiques.
Le Togo devra également investir dans le capital social de la jeunesse pour encourager l’engagement civique et politique. Pour ce faire, le rapport recommande d’étendre les réseaux de soutien social des jeunes au-delà du cercle familial, de rétablir la confiance entre les jeunes, les institutions publiques et les responsables politiques, de former les jeunes aux valeurs civiques et à l’engagement citoyen, de lever les obstacles à l’engagement civique et communautaire des jeunes, d’encourager et de faciliter la participation de la jeunesse aux processus décisionnels.
Enfin, le Togo devra faire de la lutte contre la déviance sociale des jeunes, une priorité nationale. En ce sens, il est demandé de centrer les efforts sur les actions de prévention pour enrayer la marginalisation des jeunes, d’oeuvrer pour la réintégration sociale des jeunes marginalisés, de veiller à une meilleure connaissance et application du cadre réglementaire de protection de l’enfance, de doter les structures de soutien aux jeunes marginalisés de plus de moyens pour augmenter leur capacité et efficacité d’action et de promouvoir un autre regard social sur les jeunes marginalisés.
Les travaux de cet atelier ont été ouverts par le ministre de l’Enseignement Supérieur et de la recherche, Octave Nicoué Broohm en présence du secrétaire général de la présidence, Patrick Benissan, de la cheffe de délégation de l’UE au Togo, Mme Cristina Martins Barreira, de la représentante de l’OCDE au Togo et du représentant-résident de l’UNICEF au Togo, Isselmou Boukhary.
- Broohm a souligné que la vison du gouvernement à l’horizon 2030, est de faire de la jeunesse togolaise une jeunesse épanouie, autonome et responsable qui participe pleinement à la construction nationale, en particulier dans le domaine de l’accélération de la croissance et du développement socio-économique. Il a rassuré que le gouvernement sera attentif aux résultats de ce rapport en vue de la mise en œuvre des recommandations.
Le projet « inclusion des jeunes » vise à renforcer les capacités des principaux acteurs nationaux en matière de compréhension des multiples dimensions de l’inclusion et du bien-être de jeunes, ainsi qu’en matière de conception, suivi et évaluation de politique en faveur de la jeunesse.
De façon spécifique, ce projet vise à appuyer les efforts du gouvernement dans son action en faveur des jeunes, notamment à travers l’identification des principaux défis auxquels ces derniers sont confrontés et des réponses politiques pertinentes afin de les relever. Il couvre 8 pays à savoir : la Côte d’Ivoire, le Malawi, le Pérou, le Salvador, la Moldavie, la Jordanie, le Cambodge et le
Viêtnam.