Le besoin impératif de collaboration pour combler les graves lacunes en matière de soins chirurgicaux et de formation dans le monde a été une nouvelle fois avéré lors d’une table ronde de haut niveau organisée lors de la 77e Assemblée mondiale de la santé (WHA), dont le thème principal était « Tous pour la santé, la santé pour tous. »
Cet événement, qui s’est tenu le 30 mai, a mis en lumière les synergies existantes et potentielles entre les chirurgiens, les décideurs politiques, les ONG, les universités et le secteur privé.
L’organisation humanitaire internationale Mercy Ships et l’ONG Operation Smile se sont associées pour organiser un événement parallèle à l’AMS à Genève, en Suisse.
Intitulé « Amplifier les synergies entre les ONG, les organisations multilatérales et le monde universitaire au profit des patients chirurgicaux », cet évènement s’est déroulé le 30 mai à l’hôtel Beau-Rivage de Genève.
Le panel, qui comprenait des sommités d’universités et d’hôpitaux universitaires de Zambie, du Rwanda, d’Afrique du Sud et du Pérou, a discuté du constat alarmant suivant : plus de 100 millions de procédures chirurgicales supplémentaires sont nécessaires chaque année dans les pays à faibles et moyens revenus pour sauver des vies et prévenir l’invalidité.
Le Dr Mark Shrime, médecin-chef international de Mercy Ships, a ouvert le débat en expliquant qu’il incombait aux ONG, aux organisations multilatérales et au monde universitaire de décloisonner leurs actions pour le bien des patients chirurgicaux négligés dans le monde entier.
Le Dr Wieslawa de Pawlikowski, microchirurgienne pédiatrique spécialisée en reconstruction et Directrice de la coopération internationale au Ministère de la santé de Lima, au Pérou, a souligné : « Avec le secteur public, nous pouvons trouver le moyen de donner accès à des soins chirurgicaux de qualité et dispensés à temps aux populations de nos régions. »
Le Dr Faustin Ntirenganya, Président de la Société Chirurgicale du Rwanda et consultant en chirurgie générale, onco-plastique et mammaire à l’hôpital universitaire de Kigali, a déclaré : « Nous discutons depuis longtemps de la chirurgie mondiale. Je pense que nous devrions arrêter d’en parler et passer maintenant à l’action. »
Les représentants de chaque pays ont évoqué les lacunes alarmantes en matière d’accès équitable et de qualité des soins, ainsi que les progrès limités accomplis. Le Dr Ruben Ayala, Chief Policy and Advocacy Officer d’Operation Smile, a animé la discussion, qui a constitué un événement marquant pour les deux ONG.
Le Dr Teri Reynolds, Responsable des services et systèmes cliniques à l’OMS, a rappelé que, dix ans plus tôt, la Commission Lancet sur la Chirurgie mondiale appelait à agir pour aider les personnes dans le besoin, mais qu’il était beaucoup plus difficile de le faire qu’avant 2020.
Elle a expliqué : « Nous sommes sortis de la crise du COVID avec un retard chirurgical que nous ne pourrons jamais rattraper dans les décennies à venir, à moins de faire quelque chose de totalement différent. » Elle a ajouté que la pandémie avait aggravé le défi mondial de combler les lacunes en matière de chirurgie, car le discours sur la façon dont nous nous protégeons de la prochaine menace infectieuse avait changé.
Le 29 mai, les dirigeants de l’AMS réunis en assemblée ont décidé qu’une nouvelle stratégie mondiale et un plan d’action pour les soins intégrés d’Urgence, Critiques et Opérationnels-UCO seraient élaborés pour la période 2026-2035. Le Dr Reynolds a déclaré que, bien qu’il s’agisse d’un progrès considérable, il reste encore beaucoup à faire pour que ce succès se prolonge.
Le Dr Salome Maswime, obstétricienne, gynécologue et Responsable de la division de chirurgie globale à l’université du Cap, a souligné l’importance de l’investissement dans l’enseignement et la formation des spécialistes de la santé publique et des décideurs.
Elle a déclaré : « Il faut donc former non seulement les chirurgiens, mais aussi les spécialistes de la santé publique. Mais mon domaine de prédilection, je pense, c’est le leadership. On ne peut pas externaliser le leadership. On ne peut pas le déléguer. On ne peut pas faire diriger un pays par un autre pays. Nous pouvons donner des équipements. Nous pouvons faire des interventions chirurgicales et opérer, mais nous ne pouvons pas externaliser le leadership. Et nos dirigeants ne sont souvent pas formés ou préparés à diriger des systèmes de santé. »
« Nos dirigeants ont souvent appris l’anatomie, la physiologie, la pathologie et tout le reste. Et vous attendez d’eux qu’ils règlent les problèmes de la nation ».
Elle a ajouté que dans leurs cours, les politiciens apprenaient la chirurgie et la gestion des systèmes : « Nous pensons que c’est la bonne manière de préparer la prochaine génération au changement et de modifier la façon dont les gens pensent et travaillent. Et leur donner ainsi la capacité de prendre des décisions éclairées pour l’avenir. »
Emmanuel Makasa, Directeur exécutif du Centre Régional Wits en charge de la collaboration dans le domaine des soins chirurgicaux, une initiative importante visant à améliorer les soins de santé chirurgicaux au sein de la Communauté de développement de l’Afrique australe (CDAA), a déclaré : « Il y a un fossé à combler entre les engagements politiques et leur concrétisation pour les patients. »
Walt Johnson, Responsable chez Mercy Ships de la défense des intérêts de la santé, a conclu : « Si l’un d’entre nous veut franchir la ligne d’arrivée tout seul, il échouera, mais tous ensemble, nous pouvons vraiment créer des synergies étonnantes et atteindre notre but dans les décennies à venir. »
Regarder sur YouTube la discussion de cet évènement co-organisé par Mercy Ships & Operation Smile.