La nouvelle scène africaine rythme l’Afro-Club cette semaine avec Djelykaba Bintou, Pamela Badjogo, Tanasha Donna & Khaligraph Jones, Sessimé & Nikanor, Yemi Alade & Rudeboy, Didi B et enfin Olegue.
En Côte d’Ivoire, Didi B amène le rap dans une autre dimension avec Ya pas l’argent dedans
Le rappeur ivoirien Didi B, récent président du jury du Prix Découvertes RFI, est de retour en solo avec Ya pas l’argent dedans. En écoutant ce titre, on a l’impression que le rap lui a manqué tant il balance un flow aiguisé, chargé de punchlines énergiques dès le début. Que dire de cette introduction a capella qui pourrait être citée comme cas d’école dans les amphithéâtres de la rue. Le sociétaire du groupe Kiff No Beat démontre toute la dimension de son talent, rappelant au passage qu’il n’est pas un rappeur, mais un artiste à part entière. « Ya pas l’argent dedans » est une expression populaire en Côte d’Ivoire qui signifie que « cela n’apporte aucun bénéfice financier ». Didi B n’a pas choisi de nommer sa chanson ainsi par hasard, il dénonce aussi le fait qu’être un rappeur à haut débit à l’instar d’Eminem ou de Busta Rhymes ne permet pas d’avoir un revenu sûr, en Côte d’Ivoire comme ailleurs. Une réalité dépeinte entre deux punchlines à l’endroit de ses détracteurs. Avec Ya pas l’argent dedans, Didi B repositionne le rap sur la carte musicale Ivoirienne où le zouglou et le coupé décalé étaient rois durant les années 2000.
Yemi Alade s’associe à Rudeboy pour Deceive, extrait de son album Empress
Yemi Alade vient de mettre en ligne le clip de Deceive, une chanson partagée avec l’ex-membre du duo P-Square, Rudeboy. C’est le meilleur cadeau qu’elle pouvait faire à ses fans pour clôturer cette année 2020 en demi-teinte, car il s’agit de l’un des meilleurs titres de son album Empress qui contient tout de même 15 pistes. Dans ce single, Yemi Alade et Rudeboy interprètent un couple dont le foyer se retrouve gangrené de problèmes conjugaux et sont constamment en guerre. Le personnage incarné par Rudeboy est un coureur de jupons tandis que celui de Yemi Alade est la femme méprisée et bafouée. Le sempiternel scénario maintes fois revisité. Et pour cause, ce sujet de société arrive en tête des sondages dans les magazines féminins un peu partout en Afrique où l’adultère est synonyme d’opprobre jeté sur la famille de la femme qui a été épousée. Yemi traite donc une question qui touche profondément les cœurs, mais avec un humour digne des films de Nollywood. Vous pourrez le constater à la fin de la vidéo lorsqu’elle bâillonne et attache la maîtresse de son mari. Musicalement, ce titre reste digeste bien qu’il ressemble étrangement à ce qu’elle a déjà fait avant.
Au Bénin, Sèssimè et Nikanor célèbrent l’amour avec Toi & moi
C’est à grand renfort de publications sur les réseaux sociaux que Sèssimè et Nikanor ont teasé la sortie de leur duo évènement Toi & moi dont le clip a finalement été dévoilé le 23 décembre dernier. La vidéo était tellement attendue qu’elle s’est retrouvée en tête des tendances YouTube au Bénin pendant 24 heures. En seulement 4 minutes 26 secondes, Sèssimè et Nikanor se déclarent leur amour éternel par couplets interposés. Sèssimè se montre généreuse, n’hésitant pas à pousser sa voix vers des notes auxquelles elle ne nous avait pas habituées. Elle se livre à une véritable performance vocale tandis que Nikanor interprète sa partition avec émotion et légèreté. La fusion du couple n’est pas feinte et cela se ressent dans Toi & moi où chaque note et chaque syllabe semble avoir été sélectionnée avec soin. Une belle façon de finir cette année qui n’a pas été de tout repos.
Au Burundi, Olegue choque avec son dernier tube Korayo
Après le succès monstre de Doctor, Olegue Baraka vient une fois de plus bousculer les réseaux sociaux du Burundi avec son dernier clip Korayo qui, à peine mis en ligne, fait les gros titres de la presse locale, en plus d’exploser le compteur de vues sur YouTube. Tout semblait bien parti pour que ce soit la chanson de cette fin d’année 2020, mais c’était sans compter sur les censeurs de la république qui reprochent à Olegue de faire explicitement l’apologie du proxénétisme. Dès les premières secondes de la chanson, il n’y va pas avec le dos de la cuillère : « Je t’apporte des minettes dans mon camion à benne, elles sont de qualité, pas de dette chez moi, alors sors et achètes-en une », chante-t-il. Il faut dire que son texte rejoint une actualité pas très gaie. En effet, à Bujumbura une cache d’une centaine de femmes victimes d’un réseau de trafic humain a été découverte le 14 décembre dernier. Une fois de plus Olegue, l’enfant terrible du pays, ne s’est pas fait que des amis, son rap étant jugé commercial et opportuniste par une bonne partie de la société burundaise. C’est la promotion de son nouveau single qui en bénéficie.
Au Kenya, Tanasha Donna & Khaligraph Jones se mettent au Kalypso
Tanasha Donna, Khaligraph Jones et Motif entrent en 2021 avec fracas ! Le morceau Kalypso, inspiré de Trinité & Tobago, porte bien son nom. Il s’agit d’un mix de guitare latine et de rythmes pop d’Afrique de l’Est. À l’écoute de cette chanson, il ne vous faudra que quelques secondes pour vous laisser emporter par ses accords hispaniques et les arrangements méticuleux de Motif. Une idée originale de la chanteuse Tanasha Donna qui a trouvé judicieux d’inviter son compatriote Khaligraph Jones, l’un des meilleurs rappeurs de la scène rap au Kenya. La vidéo haute en couleur a été réalisée par Jordan Hoechlin dans un décor paradisiaque du sud de l’Europe et du littoral espagnol. Les sombreros arborés par les danseurs nous font voyager jusqu’en Amérique centrale. Khaligraph Jones impressionne aussi par son aisance lyrique dès le premier couplet s’adaptant au doux crochet de Tanasha Donna qui ouvre cette chanson par quelques paroles en espagnol, en anglais et en swahili. Kalypso est définitivement un morceau de musique urbaine destiné à vous divertir. Bonne année !
La Gabonaise Pamela Badjogo s’insurge face aux violences racistes et sexistes avec Toto
Toto est le troisième extrait de son album Kaba prévu pour 2021. Pamela Badjogo brise les barrières de l’intolérance et rassemble les peuples avec ce nouveau single qu’elle interprète avec une facilité déconcertante, hypnotique et sensuelle en langue bakaningui, originaire du sud-est du Gabon. Pamela Badjogo délivre une ode à l’unité en ces temps de repli sur soi. L’univers de Pamela Badjogo rejoint celui de ses illustres prédécesseurs que sont Blick Bassy, Annie-Flore Batchiellilys, Salf Keïta ou encore Lokua Kanza. L’artiste gabonaise revisite également la musique afropop actuelle. La vidéo de Toto nous invite dans ses lieux de prédilection, les quartiers métissés et bouillonnants des villes françaises, le tout dans une ambiance afro-futuriste. Il faut noter que par son style vestimentaire, Pamela Badjogo rend hommage aux créatrices africaines et aux cultures ancestrales naturelles africaines, d’où qu’elles viennent.
En Guinée, Djelykaba Bintou annonce les couleurs de 2021 avec la Patronne
Djelykaba Bintou est la porte-flambeau de la nouvelle génération de stars féminines en Guinée. Et pour cause, elle est issue de la célèbre famille de griots Sombory. Dès son plus jeune âge, elle animait avec l’orchestre de son père Djely Kaba. C’est donc tout naturellement qu’elle se tourne vers la chanson professionnelle. Adulée par le public guinéen, Djelykaba Bintou s’impose en patronne assise sur son trône. Avec déjà deux albums à son actif, elle revendique aussi le fait d’être diplômée en commerce international, ce qui est rare dans le milieu artistique en Guinée, surtout quand il s’agit de la gent féminine. Elle se veut être un exemple pour toutes les jeunes femmes qui souhaiteraient embrasser une carrière libérale. Avec le titre Patronne, Djelykaba replace la femme au cœur de l’attention des hommes afin qu’on leur donne le respect qui leur est dû, au-delà du devoir conjugal dans une société patriarcale. Djelykaba est une artiste, mais également une entrepreneuse qui s’investit dans la scolarisation des jeunes filles de son pays.
Tous les titres de cette sélection sont à écouter dans la playlist de DJ Face Maker sur Deezer et à regarder sur YouTube avec RFI Musique.Par : Hervé Mandina