En Gambie, Yahya Jammeh sous pression après sa brusque volte-face et son annonce de ne plus reconnaître sa défaite à l’élection présidentielle face à Adama Barrow.
La Cédéao a dépêché ce mardi une mission à Banjul composé de plusieurs chefs d’Etat venus du Liberia, du Nigeria, du Ghana et de Sierra Leone. L’objectif affiché de ces représentants est très clair, mais sa mise en oeuvre risque de l’être beaucoup moins.
C’est une journée cruciale, voire décisive pour la Gambie. Une journée où tout peut basculer. « On peut s’attendre à tout », a déclaré le président de la Commission de la Cédéao Marcel de Souza.
L’organisation affiche un unique objectif : pousser Yahya Jammeh à quitter définitivement le pouvoir. Il faut lui faire comprendre qu’il doit lâcher le pouvoir, qu’il n’y a pas d’autre issue possible, que sa volonté de déposer un recours devant la Cour suprême arrive trop tard et que sa première déclaration, la reconnaissance de sa défaite, a signé la fin de son règne sur la Gambie. « Un homme d’Etat qui a donné sa parole ne devrait pas remettre en cause les résultats »,
a déclaré sur RFI le président de la commision de la CEDEAO,Marcel de Souza Mais personne n’est en mesure de dire si l’imprévisible ex-président, critiqué de toute part, acculé par les instances africaines et internationales va plier.
Pour la délégation des quatre chefs d’Etat arrivée en début d’après-midi, la première étape de cette visite sera déjà de rencontrer Yahya Jammeh. Il y a dix jours, après l’annonce des résultats et la victoire d’Adama Barrow, l’ex-président avait refusé un entretien avec Mohamed Ibn Chambas, le représentant des Nations unies dans la sous-région. Sur le papier, il ne peut pas refuser d’accueillir quatre chefs d’Etat.
L’ex-président, fermé à toutes discussions durant 22 ans, est-il prêt à négocier avec la Cédéao ? Quelle porte de sortie peut lui proposer l’instance ouest-africaine qui avait salué sa déclaration lorsqu’il a reconnu sa défaite ? La marge de manœuvre est en tout cas réduite.
Autre élément qui pourrait être utile, ou au contraire énerver Yahya Jammeh : la présidente en exercice de la Cédéao et présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, a demandé à son homologue du Ghana de venir à Banjul. Une situation intéressante, car vendredi, au moment où Yahya Jammeh faisait volte-face, John Dramani Mahama reconnaissait au contraire sa défaite et acceptait la transition politique. Yahya Jammeh est-il capable d’entendre un tel argument ?
En tous les cas, la CEDEAO a déjà menacé d’utiliser la force s’il refusait de lâcher le pouvoir. En Gambie, Yahya Jammeh est aussi de plus en plus isolé. Après les professeurs d’université, les avocats viennent d’annoncer que sa volte-face était une trahison. Le chef d’état-major de l’armée, Ousmane Badjie, a affirmé sa loyauté au nouveau président élu Adama Barrow. A l’image du site de la présidence gambienne, piraté le week-end dernier, et sur lequel apparait désormais le message « site en construction », les Gambiens joints au téléphone savourent leur démocratie retrouvée, veulent construire leur « nouvelle Gambie » et ne sont donc pas prêts à se faire voler leur liberté retrouvée par Yahya Jammeh. RFI