Pour son neuvième album en trente ans, Mathieu Boogaerts avance à nouveau à mots et mélodies feutrés, mais pour consigner cette fois les états d’âme de sa cinquantaine. Dans le mélancolique « Grand piano », sorti le 17 janvier, le chanteur français excelle dans l’art des nuances rythmiques.
Depuis trente ans, Mathieu Boogaerts ressasse avec délicatesse ses thèmes chers. Doutes, frustrations, regrets ou désirs traversent ainsi à nouveau « Grand piano », son neuvième album, au sein d’un répertoire qui compte désormais quelque 150 chansons depuis 1996 et ses débuts avec « Super ».
Il y a toujours aussi cette fausse naïveté qui exprime sur le ton de l’intime ses états d’âme, avec des pointes d’autodérision. Aujourd’hui, la différence par rapport à ses disques précédents est que ce « Grand piano » très mélancolique tient presque de la superproduction en termes d’instrumentations. Une batterie, une basse électrique, une basse synthétique, une guitare électrique, une guitare acoustique, un synthétiseur, un saxophone, une flûte, un accordéon, un choeur, des percussions, un piano électrique et un piano droit accompagnent les mots de Mathieu Boogaerts qui pratiquent aussi à merveille la syncope.
>> A voir, le clip de la chanson « Dans une case » de Mathieu Boogaerts:
Grands moyens orchestraux, mais chansons déliées
Les grands moyens orchestraux ne se ressentent pourtant jamais au fil des douze chansons de « Grand piano » qui apparaissent déliées, nuancées, douces, à la fois légères et fragiles. Avec cette dimension pop mélodique, pleine d’un groove qui lorgne parfois vers les rythmiques africaines qui pourraient évoquer celles de Paul Simon et Vampire Weekend, le répertoire de Boogaerts s’épanouit comme rarement. Et « Grand piano » d’agir comme un écho à l’exquis « 2000 », consignation de ses doutes de trentenaire livrés au tournant du siècle.
Après la semi-déception que constituait le conceptuel et pulsionnel « En anglais » voilà quatre ans où le chanteur s’était métamorphosé en Mathiou, on retrouve sur « Grand piano » un Boogaerts en pleine forme, dans la fleur de l’âge à presque cinquante-cinq ans pour cultiver gracilement et indolemment son art du contre-pied stylisé qui a déjà fait le bonheur également de Vanessa Paradis ou Camélia Jordana.
Olivier Horner